Mondiaux en Corée : la belle histoire écrite par le Lorrain Ludovic Remy et les Bleues

1947, 1991 et 2024. A seulement trois reprises dans son histoire, le ping féminin tricolore a décroché une médaille mondiale. 33 ans après, les Bleues viennent de monter sur le podium en Corée et ont changé de dimension à cinq mois des Jeux de Paris. A la genèse de cet exploit, un homme : le Vosgien Ludovic Remy. L’enfant de Cheniménil, au parcours incroyable, livre ses émotions.

Est-ce qu’on peut considérer que vous venez de vivre vos plus grandes émotions sportives ?
« Je pense que oui. Une médaille en championnat du monde, c’est toujours… Enfin, pas toujours parce que je ne l’avais jamais fait. Mais c’est quelque chose que je n’avais pas forcément imaginé. Je suis quelqu’un qui avance et qui essaie d’être performant sans se donner de limites. Mais bon dans le contexte du ping mondial féminin, plus concurrentiel que le masculin, ça paraissait difficile. Il faut mesurer la portée de cet exploit même si on ne se rend pas encore trop compte. Mon plan de route va plus vite que prévu. »

On a en tête l’image de la qualification pour le carré final avec Prithika Pavade au sol et vous, comment dire…
« J’étais complètement KO, inerte, j’avais déconnecté mon cerveau (rires). Ce sont des moments qu’on a envie de prolonger pour que ça ne s’arrête jamais. »

« L'objectif était le top 8 »

Et cela rentre dans un contexte encore plus global avec l’exploit parallèle des garçons. Vous avez assisté à leur finale ?
« Non, je suis rentré à Paris avec Jianan (Yuan, n°1 tricolore). Les autres filles restaient en stage en Corée. Je les rejoins à Singapour pour un tournoi à partir du 7 mars. On fait un turnover, il y a tellement de compétitions avant les Jeux de Paris. Des championnats du monde, mentalement c’est dur. C’est la compétition la plus difficile que j’ai vécue en tant que coach. Ça essore. L’objectif fixé aux filles était le top 8. Il fallait déjà passer la poule et au mieux finir premier. En 8e de finale, on joue le Portugal qui nous avait battus 3-0 pour la place 3-4 des Jeux Européens. Une équipe compliquée parce que Prithika (Pavade) perd toujours sur Fu Yu et Jiéni Shao (NDLR : la leader d’Etival). Après on joue l’Allemagne, le meilleur tirage pour nous parce que leur n°1, Ying Han (n°9 mondiale) était absente. Cela fait partie du sport. »

« J’ai eu trois des cinq filles au pôle de Nancy »

Vous dîtes que le plan de route va plus vite que prévu. Quel était ce plan de route ?
«  Je suis arrivée en 2020, on a fait deux médailles aux championnats d’Europe, 4e aux Jeux Européens. Mes premiers Mondiaux s’arrêtent en 8e de finale. Il y a eu aussi un titre et des médailles européennes en mixte. A mon arrivée, on était 27e nation du monde. Aujourd’hui on est 8, on va même peut-être monter un petit peu. C’est important pour ne pas être 9-16 aux Jeux de Paris et prendre directement une nation forte. »

On a l’impression que le bon combo a été trouvé pour cette équipe, avec la vague montante et la toujours jeune Jianan Yuan (39 ans en juillet). Se trompe-t-on ?
« Non. Jianan est arrivée en équipe de France en 2018, je l’ai récupérée en 2020. J’ai eu trois des cinq filles au Pôle de Nancy, Jianan est là pour les faire progresser. Elle le sait, rien n’est caché. Elle est montée 16e mondiale il y a quelques mois et elle nous guide. Et moi j’avance avec les filles. »

« Je suis très exigeant »

C’est quoi la méthode Ludovic Remy qui a fait ses preuves à Metz en club, en équipe de France jeunes , en équipe de France A ?
« Je ne sais pas mais il faut être humble et vouloir toujours améliorer les choses. Je suis intraitable sur le contenu, le niveau d’exigence. Il faut être en accord avec la haute performance. Je suis très exigeant. En fait aujourd’hui, je dis aujourd’hui car j’ai beaucoup évolué, j’ai un cadre, des choses incompressibles sur le travail. Après, j’essaie de laisser faire ce dont elles ont envie dans ce cadre. »

Pour le grand public, le “ping” c’est la Chine. Et là, il y avait la France en face…
« Oui, c’est ça. Et deux fois car les garçons étaient en finale contre eux. »

Vous vous êtes acheté une belle et bonne pression pour les Jeux de Paris, non ?
«  On était dans une dynamique incroyable, on est passé dans une autre dimension où on change d’image et quasiment de sport. On va assumer, on a des postes à responsabilités mais c’est notre boulot. »

© L'Est Républicain - 28 février 2024 / Sport lorrain